Louis Reboul Maire d'Agde de 1945 à 1953
Louis Reboul est né à Agde le 08 septembre 1903. Fils d'Antoine Reboul et de Guiseppina Brusco, il est issu d'une famille dont les racines agathoises remontent au moins au début du 18ème siècle. L'élève Reboul fit toute sa scolarité à Agde avant de rejoindre l'exploitation vinicole familiale.
Fait Pupille de la Nation en juin 1922, en raison du décès de son grand père mort pour la France durant la Première Guerre Mondiale, il épouse ce même mois Jeanne Pujol, dont il aura trois enfants, Alain, Max et Annette. Lui qui se destinait à une carrière de receveur dans la fonction publique, reprend alors la boucherie de son beau-père situé rue des Muses.
Grand amateur d'art, féru d'opéra, de poésie (il en écrit à ses heures) et de théâtre, il rejoint en 1935 "1'Escolo daù Sarret", pour laquelle il écrit le poème "Lou Sarret".
La carrière politique de Louis Reboul débute en 1938, année où il est élu Conseiller Municipal pour la première fois. Il le restera jusqu'en 1941, date à laquelle il est démissionné par le gouvernement de Vichy. Il faut dire que depuis 1940, il est prisonnier en Allemagne et ne sera libéré qu'en 1943, au titre de la relève. A la Libération, il reprend son activité politique et devient Maire le 29 avril 1945. La même année, il entre au Conseil Général - dont il deviendra Vice-Président en 1951, après avoir été réélu dans son canton, Deux ans plus tard, le dimanche 19 octobre 1947, Louis Reboul est réélu au premier tour Maire d'Agde, mandat qu'il exercera jusqu'en 1953. Cette année-là, trop confiant en sa réélection, il mène une campagne timide et voit sa liste échouer face à celle menée par Louis Vallière. Il retourne alors un temps à la boucherie familiale, que tiendra après lui son fils Alain, mais continue toutefois d'exercer son mandat de Conseiller Général jusqu'en 1958. Il mène ensuite une vie plus tranquille, cultivant ses vignes et ne s'impliquant plus qu'occasionnellement dans la vie politique locale, Le 03 août 1956, Louis Reboul est nommé Chevalier de la Légion d'Honneur. Il décède le 26 mai 1966, à l'âge de 62 ans, laissant le souvenir d'un homme de bon sens, très travailleur et faisant preuve d'une grande opiniâtreté en toute circonstance.
Un Maire élu à deux reprises à la Libération
Après le débarquement en Afrique du Nord, Agde est occupée par les troupes allemandes le 11 novembre 1942. Immédiatement, la bande côtière est évacuée sur 200 à 400 mètres et la zone interdite à la population. De nombreux blockhaus sont bâtis sur les plages, dans l'attente d'un éventuel débarquement des forces alliées. En ville, de nombreux bâtiments publics et privés, comme le Château Laurens et le Château Trédos, sont réquisitionnés par l'occupant. En janvier 1944, les trois quarts de la population sont évacués vers les villages de l'arrière-pays. Le Conseil Municipal est dissout par le Ministère de l'Intérieur. A sa place, est constituée une délégation spéciale de quatre personnes présidée par Jean Félix, le Maire précédemment en place. Le débarquement en Provence du 19 août 1944 est le signal de la débâcle pour les troupes d'occupation. Celles-ci, fuyant la ville, font sauter les stocks de munitions et volent les moyens de locomotion: voitures, fourgonnettes, camions, chevaux et même vélos. Le 21 août, un Comité de Libération est institué sous la présidence de Lucien Petit et chargé d'administrer une ville aux rivages dangereusement minés, aux vignes laissées de longs mois en friches et aux routes souvent devenues impraticables. De plus, seul un quart de la population réside encore en Agde. Dès sa mise en place, le Comité se donne trois objectifs: le/ravitaillement, le rétablissement de la légalité républicaine et le retour de la population, qui se fera peu à peu à partir de septembre 1944.
Comme sur l'ensemble du territoire national, des élections sont organisées en avril et mai 1945.
Trois listes sont en présence: celle du Parti Socialiste menée par Roger François, éliminée dès le premier tour, celle de l' « Union Patriotique et Républicaine » composée notamment des anciens du Comité de Libération menée par Georges Jalade, enfin la liste d' « Union démocratique et républicaine » de Louis Reboul qui arrive en tête au second tour avec 1313 voix contre 977. Il est à noter que l'ancien Maire Jean Félix fait un score de 259 voix au premier tour alors qu'il n'est même pas candidat.
Louis Reboul est donc élu_aire par le Conseil Municipal le 16 mai 1945. Ses deux premiers Adjoints sont respectivement Joseph Poujol et Marius Leautier. On nomme également au vu des "circonstances de l'après-guerre" un Adjoint Supplémentaire: Adolphe Pariot. Des commissions sont mises en place: "Administration et finances", "Urbanisme, eau, gaz, électricité", "Voirie urbaine et rurale", "Ravitaillement" et "Fêtes et marchés". L'équipe va tout d'abord s'attacher à la reconstruction des infrastructures, notamment des réseaux. Mais pour mener à bien ces projets, il lui faudra relever les taxes locales à plusieurs reprises.
En 1947, une nouvelle élection municipale a lieu, qui voit Louis Reboul réélu dès le premier tour. Les priorités municipales sont alors davantage orientées vers l'action sociale, le développement touristique et l'aménagement urbain.
Deux mandats placés sous le signe de la reconstruction
La première décision prise par le Conseil Municipal est de démonter la ligne électrique construite par les Allemands sur le Front de Mer pour faire fonctionner leurs infrastructures militaires. Le matériel ainsi récupéré permet de réalimenter le Grau d'Agde en remettant en service les anciennes lignes. Par ailleurs, plusieurs contrats sont signés avec des compagnies privées, auquel le réseau électrique est concédé, afin qu'elles en supportent les frais de reconstruction.
L'approvisionnement de la population en eau potable constitue un autre pôle prioritaire d'investissement. Les problèmes que rencontre la Municipalité en la matière sont simples: l'eau des puits est saline, celle de l'Hérault impropre à la consommation, tandis que les besoins de la population augmentent et que l'on manque, en ces premières années d'après-guerre, du chlore nécessaire au traitement des eaux. Des crédits sont accordés afin de rechercher des solutions nouvelles. Des procédés chimiques novateurs sont ainsi utilisés tandis que la Ville fait l'acquisition de nouveaux puits et creuse plusieurs forages. Conséquence de ces dépenses, le prix de l'eau est régulièrement revu à la hausse: de 3 F/m3 en 1945 il passera à 6 F/m3 en 1948. En octobre 1945, la ville adhère au Syndicat de communes du bassin de Thau pour la gestion de l'eau.
Parallèlement, c'est à cette époque qu'ont lieu les premières études pour la construction d'un réseau d'égouts, sa mise en place ayant lieu sous le second mandat. La reconstruction concerne également le secteur routier. De nombreux crédits y sont consacrés car pratiquement tous les axes sont à rénover. Parallèlement, la Municipalité Reboul autorise la compagnie Serres à exploiter à nouveau la ligne de bus qui relie Agde à Béziers afin, notamment, de faciliter le transport des collégiens.
Un goût prononcé pour l'urbanisme
Dès octobre 1945, Louis Reboul procède à la nomination d'un architecte et lance une véritable politique d'urbanisme. Après avoir rénové les bâtiments communaux ayant souffert sous l'occupation, il décide de la démolition d'un certain nombre d'immeubles vétustes afin de permettre un éclaircissement des quartiers, qu'il accompagne d'une action de réalignement des rues. En 1946, il met à l'étude avec l'architecte Mourre un plan d'urbanisme concernant le Grau d'Agde et la Tamarissière. "La reconstruction moderne de notre station balnéaire exige une certaine discipline dans la construction et l'établissement des réseaux et de la voirie" précise-t-il alors en Conseil Municipal. En 1950, un plan de circulation est élaboré par les Ponts et Chaussées avec la pose de panneaux directionnels, aux différents carrefours de la commune.
Louis Reboul doit également faire face à la crise du logement qui sévit en Agde comme sur l'ensemble du territoire national.
C'est ainsi durant son mandat que sont construites les premières "Habitations à Loyer Bon Marché", futures HLM, entre la route du Cap d'Agde et le chemin de Janin, en vis-à-vis du stade Jean Roger. Ces 30 logements seront suivis de la construction des HLM au lieu-dit "La Piscine".
En 1952, Louis Reboul décide la création d'une caserne pour les pompiers, qu'il installe dans un hangar rue Danton, acheté pour 3 500 000 F. Enfin, il s'attache à rénover les établissements scolaires qui, pour la plupart, ont été durant le conflit occupés par les troupes allemandes. Il doit lui aussi faire face au fameux "baby-boom" des années d'après-guerre, ce qui entraîne la création de classes supplémentaires et la construction en 1948 d'une crèche au Grau d'Agde.
Les activités physiques sont facilitées par la construction à proximité du stade Jean Roger d'un plateau sportif, qui nécessite au préalable le déplacement du Cimetière des Sœurs, où aucune inhumation n'avait eu lieu depuis 30 ans.
Un précurseur en matière touristique
Le 18 août 1946, le Conseil Municipal "déclare donner adhésion pleine et entière à la création d'un Syndicat d'Initiative et devoir faciliter sa tâche d'intérêt général". Ce Syndicat d'Initiative est dirigé par une chambre comprenant des professionnels représentatifs de ce secteur. l'année suivante, le Maire procède à la demande de classement d'Agde en tant que "commune et station touristique". C'est l'occasion de faire l'inventaire des atouts touristiques de la Ville. Les curiosités sont alors définies comme suit: "cathédrale du 12ème siècle musée, mairie, maisons de style renaissance, châteaux - monastère Notre-Dame du Grau Tour des Anglais - divers immeubles classés monuments historiques - Fort Brescou". Pour les curiosité naturelles, on trouve: "Cap d'AgdeMôle jetée Richelieu - Bois de la Tamarissière Rives de l'Hérault - Pic St-Loup".
La ville compte "10 hôtels ou pensions de famille, 180 chambres, 360 meublés en villas, 1710 chambres meublées avec eau courante, WC, douches, gaz, électricité, téléphone".
La fréquentation de la ville est estimée à 12 000 personnes et la durée du séjour est en moyenne d'un mois sachant que la saison débute officiellement le 1 or juin et s'achève le 30 septembre. La taxe de séjour rapporte alors près de 900 000 Francs. Dans les années qui suivent, les petits équipements touristiques se multiplient. Le "Château-vert" et la "Pergola" sont autorisés à exploiter des jeux de casino (la commune prélèvant jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires réalisé avec un minima de 250 000 F chaque année). Des plans de ville sont installés à l'usage des visiteurs et un parking situé Place du Commandant Vibert, non loin de la plage du Grau, est aménagé. Enfin, c'est en août 1952 que des renforts de police arrivent pour la première fois, de Pézenas et de Montpellier, afin de faire face à la hausse de la population en période estivale.
Une action sociale déterminée
En 1947, la situation économique n'est pas fameuse, ce qui entraîne de sérieuses conséquences sur le plan social. Les caisses du "Bureau de Bienfaisance", préfiguration de l'actuel Centre Communal d'Action Sociale, reçoivent, en plus de ce que prévoit son budget annuel, de nombreuses subventions complémentaires motivées dans le registre des délibérations municipales par "les grèves en cours au sein de la classe ouvrière" ou "les secours en nature normalement attribués aux nécessiteux par cet organisme" qui "doivent être étendus à de nouvelles familles sans ressources". 1953 voit malheureusement l'apogée du chômage en Agde (20 personnes dans l'agriculture, 80 dans le bâtiment et 26 dans des domaines divers). C'est aussi l'année de la création d'un fonds de chômage qui complète l'action du "Bureau de Bienfaisance" .
La réouverture de l'Hôpital Victor Lachaud constitue aussi l'une des préoccupations de l'immédiate après-guerre. En effet, son état général n'autorise pas une reprise de ses activités, sans que des travaux soient réalisés. De plus, en 1945, il accueille le Centre départemental de déminage où sont employés des "travailleurs allemands".
Le bâtiment retrouvera sa vocation initiale en 1947 avant d'être modernisé et agrandi trois ans plus tard avec une capacité d'accueil qui passe alors de 40 à 80 lits (prénatal, nourrissons, gériatrie, centre antituberculeux et soins médicaux). En 1951, on y regroupe même tous les dispensaires existants et on y construit une buanderie.
Louis Reboul mène une politique "sociale" au sein même de l'administration communale. Il n'est pas rare de trouver dans les Délibérations du Conseil Municipal le vote d'une aide financière pour les employés partant en retraite.
Il est d'ailleurs intéressant de souligner qu'en 1949, la Mairie compte 12 agents titulaires, 25 agents auxiliaires et 28 journaliers. L'affiliation du personnel communal à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales intervient en 1948 et en 1951, les employés titulaires sont rattachés au régime de sécurité sociale.